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Est-il aujourd’hui nécessaire de rappeler qui est Robert Lioy ? Derrière son avatar digital d’Access To Arasaka, il est plus que probablement l’artiste qui a apporté l’impulsion nécessaire à ce genre batard que l’on nomme nous même IDM. Influencé par des références absolues comme Autechre ou Chris Clark, ses oeuvres cyberpunk et apocalyptiques trahissent une maîtrise technique époustouflante. Le létal Oppidan ainsi que le frénétique et inhumain Void() avaient bâti les fondations d’un univers gouverné par les machines. Depuis Orbitus, un sentiment plus émotionnel transpire de ses hyper-productions. Le Geosynchron d’aujourd’hui est librement inspiré du dernier tome de la trilogie de David Louis Edelman. De là à penser qu’ATA pose ici la pierre finale de sa propre trilogie sur Tympanik, il n’y a qu’un pas. Un petit pas pour l’homme, un immense pour la musique électronique.

Faisons table rase de ce qui a vécu. Et de ce qui est mort. Ne rouvrons donc pas la chapitre où l’homme a érigé un système qui l’a dépassé pour finalement causer sa perte.

Les lumières crues des mégalopoles se sont éteintes pour laisser poindre un soleil noir étiolé. L’anéantissement des structures organiques par les machines a laissé place à une nuit permanente, à un chaos sans nom, où les clivages raciaux et sociaux se sont effacés pour que le simple instinct de survie prédomine. Combien de morts pour une poignée d’élus ? L’espèce humaine s’est pris dans la gueule le météorite que les dinosaures n’avaient pas senti venir. Vient donc le temps de l’exode, d’une nouvelle genèse pour ce qui reste de l’humanité. Il est temps de partir à la recherche de zones franches et libres, là où un hypothétique cessez le feu avec les gargouilles cybernétiques et les nouveaux êtres hybrides est possible. Là où l’implacable machine d’annihilation ne répandrait pas ses fumées noires et ses pluies acides. Ce lieu, Sion post-moderne, est un mythe. Dans sa lente transhumance, l’humain ne semble rien avoir appris de ses erreurs du passé. Même à l’agonie, notre espèce ne s’est pas émancipée de sa perpétuelle quête de pouvoir, de sa foi en Dieu et en une hypocrite démocratie. Le dernier chapitre est planté. La fin est proche.

Bien que définitivement touchée par des textures spatiales, la musique d’Access To Arasaka illustre une certaine odyssée de l’espèce. Geosynchron n’est pas possédé par la fièvre anarchique de void(); ni par la majesté d’Oppidan. Il est pourtant son ouvrage le plus personnel, dépeignant la résistance et le refoulement de ses propres limites, la discordance individuelle et l’impuissance face à la peur. Rarement sa musique n’a rejeté tant d’écorchures. Les spectres ambient qui émergèrent sur Orbitus ont atteint leur point de transmutation. Les nappes, ces parois immatérielles, se déchirent en exhalant des ondes vrombissantes. A la manière d’un avant-propos, les premiers titres enveloppent l’esprit et collent des images devant les yeux. Les trames se dessinent, les enjeux se devinent, brumisés par des vagues nébuleuses (Ixion). Mais telle la perquisition de la lune au début d’Ubik, on voit venir trop tôt la substance perturbatrice. Talitha, ou l’hymne divin de l’innocente déchéance. Rarement ATA n’a infligé à ses sons cette pluie vorace de breakbeats, semblable à des aiguilles acides cisaillant nos connexions. Il y a par la suite comme une odeur de paix, d’accalmie factice dans les décors d’Oberon. Mais une pincée de sable, comme un battement d’ailes de papillon mutant, a pénétré les rouages. Le conflit, ambivalent, épique et déséquilibré peut reprendre ses droits.

Comme sur Metax et Oppidan, ATA épure ses lignes pour intégrer une voix, celle de Jamie Blacker sur le superbe Lysithea. Ce track n’annonce pas de transition, c’est une bouffée d’air (pas complètement pur quand même) qui sonne à la manière d’une comptine cold wave rassurante pour canaliser les peurs et les angoisses des enfants que nous fûmes. Une prière face à un avenir incertain mais nécessaire. AlcyoneKaguya et Rana poursuivent le sillon destructeur des conflits et des angoisses de notre monde moderne. Des tissus d’interférences surréalistes, des lambeaux temporels dont la consistance se dissipe. D’une lente descente vers les tréfonds d’une âme anonyme et fragmentée, que seuls d’épars rayons embrasés illuminent, exceptionnellement.

Robert Lioy signe ici un nouveau chef d’oeuvre. Mais il y a comme une saveur de fin de cycle dans ces aventures torturées et apocalyptiques. Que peut-il bien nous réserver pour la suite ? Seul lui le sait. Mais s’y autorisera-t-il ?

This is my desire for a dark future with neon cities and cyberware. My longing for fully interactive neural internet, gang warfare and corporations acting as governments. Monolithic arcologies reaching for the sky in acity that’s constantly shrouded by rain. It’s what I would hear in the soudtrack of the Chatsubo. In freezone. In the metaverse. It is the aural vision of the world I wish I lived in. Ainsi parlait Access To Arasaka.

Il restera de notre époque quelques oeuvres saine et inspirées. Il restera la musique et l’homme. l’homme contemporain qui n’a plus le temps d’aimer, qui n’a plus les ressources de la solitude. Il restera l’homme éternel dans la cité multiple, les pieds rivés au quotidien, avec une poitrine de rossignol et des mains de terrassier.

>> Cette critique a été écrite par Ed Loxapac et Manolito de Chroniques Electroniques

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