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La ville, c’est le mouvement, le bruit, l’activité permanente, un tumulte incessant et oppressant. La ville va trop vite, elle est un halo de lumière en mouvement, une lumière qui tourbillonne. La ville, c’est ce qui effraie Antonioni. C’est Milan qui écrase Monica Vitti. C’est la débauche de la nuit qui perd Jeanne Moreau. La ville, c’est la fin de la communication et le début de l’incommunicabilité. A cause de la vitesse et de l’absence totale de repos. Gigantisme obscur, mais surtout fascinant.

Les villes se transforment sans arrêt, elles vivent aux sons des travaux et des marteaux-piqueurs, des bruits des grues et de la pluie qui bat le pavé entre les sons diffus des boîtes de nuit. La ville n’inspire que rejet et dégoût. Et pourtant elle obsède. La nuit, elle devient une autre. Les rues prennent d’autres formes, elle devient un labyrinthe où il fait bon se perdre, seul, à déambuler bêtement. C’est dans ses instants que la ville est belle, que sa taille inhumaine devient agréable, la ville devient saisissable. Quand les lumières des voitures flashent et les lampadaires tentent vainement d’éclairer le noir perturbé par les lueurs aux fenêtres d’appartement encore éveillés, on se convainc inutilement que la ville est magnifique parce qu’elle est un rêve éveillé.

Burial, profondément ancré dans la ville, claque ses sons comme une goutte de pluie sur un trottoir, les ambiances ont la profondeur du noir d’une rue désaffectée où seulement quelques aventuriers oseraient s’y rendre. Il y a dans chacun de ses sons la peur urbaine de se faire suivre après une soirée trop arrosée. Il y a chaque crissement de pneu terrifiant, il y a aussi la beauté sombre de l’inconnu et de l’errance. Errer, c’est magnifier le rien de nos déplacements, tenter pour un instant de rendre l’environnement urbain attrayant, diviniser la routine et le quotidien. Burial enjolive l’errance et la ville, il écrit la bande son de la plus belle des ballades au plus profond de la ville. Cette ville là n’est en aucun cas réelle, elle est idéalisée, à la fois repoussante et fascinante, elle est le New York de Céline ou la bourgade paumée du nord de l’Angleterre, elle est le Paris rêvé et le Melun qu’on cherche à fuir. Parce que la nuit, toutes les villes sont les mêmes, noires et lumineuses, Burial leur donne simplement l’âme qui leur manque.

Chez Hyperdub, Burial revient comme le messie avec trois titres captivants, sous le sobre nom de Street Halo EP. Burial a compris la ville, il l’exprime mieux que quiconque, et même si la nuit s’efface, les cités désertes et inconnus dont il a formé les ambiances demeurent.

Note : 8/10

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