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ARBOBO

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La Féline – Le royaume
Extrait de “Triomphe” – 2017 – Pop 21e siècle
Aldous Harding  – Horizon
Extrait de “Party” – 2017 – Folk de sorcière
Tamikrest – Erres hin atouan
Extrait de “Kidal” – 2017 – Blues touareg

Agnès Gayraud (a.k.a La Féline) a réussi un petit exploit avec son album Triomphe. Ecriture, chant, arrangements, atteignent un niveau rare et les chansons se fondent en un ensemble harmonieux, alors même que pointent des influences venues d’un peu partout dans des registres complètements différents. Plus difficile encore, elle parvient rapidement à faire oublier les références pour affirmer encore plus que dans les disques précédents son ton, sa marque. Mêlant gravité et sensualité dansante, La Féline signe un disque qui contribue à porter très haut la pop française. Pas encore aussi reconnue que Charlotte Gainsbourg dont Rest est un des coups marquants de l’année, mais plus que les nouvelles Swan Ink dont le EP Going deeper commence à peine à circuler hors de Marseille, le Féline triomphe bel et bien en 2017. Ajoutez l’un des plus beaux titres de l’année, les “palmiers en hiver” de Marie-Flore, et l’année française fait joliment envie.

Aldous Harding est en train de devenir l’artiste chérie du public français “indé”, et l’artiste que j’aurai le plus vue sur scène ces dernières années. Aimable et simple quand on la croise, déchirante sur ses titres les plus nus, drôle sur d’autres, captivante à tout moment sur disque ou en live, Aldous Harding est habitée. Il y a du monde là-dedans, sa voix, son visage, peuvent changer en une fraction de seconde, toujours avec justesse, avec un naturel qui laisse bouche bée. On l’a même découverte en fin d’année groovy et sexy dans un clip inédit, ce qui laisse présager qu’elle n’a pas de limite. Ca tombe bien: on est prêt à la suivre n’importe où. Comme il fallait choisir qui mettre à l’honneur, ce sont rien moins que le Laetitia Sadier source ensemble, LCD Soundsystem, Feist, et Beth Ditto qui se retrouvent sur le banc des remplaçant.es.

Il y a des périodes où j’ai surtout besoin de musiques avec lesquelles travailler. Des musiques qui me parlent en douceur et avec lesquelles je peux passer des journées entières. Ces journées là, Tamikrest en a souvent fait partie en 2017, que ce soit avec leurs albums plus anciens ou le dernier, qui n’est pas leur meilleur mais montre une belle capacité à se renouveler (en puisant dans le rock occidental, en l’occurrence, plutôt que dans le foisonnement de genres qui bout à l’ouest du Sahara). J’ignore pourquoi, des groupes de blues touareg, c’est avec celui-ci que j’ai noué une affinité plus durable. Ce que je sais, c’est jamais je ne me lasse d’eux, et que leur esprit de résistance est nécessaire dans nos temps troublés. Non pas que je me lasse d’autres groupes qui se sont illustrés en 2017 comme Acid mothers temple dans un registre plus tempétueux, Daughter, the Feelies, ou Rodolphe Burger, autre bluesman intransigeant.

 
 
 

MARC MINEUR

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Arcade Fire – Everything Now
Extrait de “Everything Now” – 2017 – Rock de stade
The National – The Day I Die
Extrait de “Sleep Well Beast” – 2017 – Rock digne
Girls In Hawaii – Willow Grove
Extrait de “Nocturne” – 2017 – Mélancolie de plat pays

Après une année marquée par les disparitions, 2017 fut une année de retours d’artistes qui nous sont chers, pour le meilleur et pour le pire. Ce sont trois groupes importants pour différentes raisons qui sont présentés, et au-delà de leur album de l’année, ce sont des carrières sur lesquelles on aime revenir.

Il faut être honnête, chaque album d’Arcade Fire est moins bon que le précédent. Avant de devenir embarrassants, il n’est pas inutile de se pencher sur leur cas. Certes, il y a très peu de bons morceaux sur Everything Now, mais il contient une plage titulaire qui est sans doute leur chanson la plus diffusée et la plus immédiate. Faire ses courses en entendant ce groupe qui nous a procurés tant de frissons est une expérience déroutante en tous cas, renforcée par ce piano qu’on penserait volé à ABBA mais que le ‘grain’ du son vient sauver. Nous nous sommes tant aimés, il est sans doute temps de se dire au-revoir, sans amertume.

Par contre, The National a su rester au sommet. On connait leur recette, on chérit déjà la voix de Matt Berninger pourtant leur ardeur ne s’émousse pas, notre attachement reste constant. Réentendre tout dans l’ordre en concert dix ans après sa sortie met en tous cas en relief une des discographies les plus constantes de l’époque, que le succès ne semble pas écorner. En Belgique, leur popularité leur permet de remplir n’importe quelle salle, mais on prend le même plaisir que dans les petites salles il y a douze ans. ‘The day I die/Where will be ?’ On sera sans doute encore là.

Marqué par le décès accidentel d’un de leurs membres, Everest des Belges de Girls in Hawaii était forcément sombre mais très majestueux, donnant enfin la mesure d’un talent plus supposé que patent. Avec Nocturne, le doute n’est plus permis, ils continuent à encapsuler de la mélancolie et de la lumière dans des morceaux toujours lisibles et libres. Bien conscients de leurs forces et faiblesses, ils arrivent à faire ressortir les premières et oublier les secondes.

 
 
 

THOMAS MESSIAS

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Jenifer – Je danse
Extrait de “Appelez-moi Jen” – 2010 – Urban hymn
Rock Plaza Central – Oh I can
Extrait de “…At the Moment of Our Most Needing or If Only They Could Turn Around, They Would Know They Weren’t Alone” – 2009 – Mantra
Maxime Le Forestier – Raymonde
Extrait de “Passer ma route” – 1995 – Pas une solution

Pardon d’avance pour ces quelques lignes, à peine dignes d’un livre de développement personnel, mais pour moi, l’année écoulée m’aura permis de gagner en cohérence entre le moi intérieur et le moi extérieur. Il n’est pas toujours simple d’assumer ses convictions, ses envies, son identité profonde. J’ai mis du temps à y parvenir. C’est en train d’arriver. Je suis même presque fier d’avoir osé choisir pour cette playlist annuelle un morceau signé Jenifer, ce qui n’est pas exactement dans la ligne habituelle du site. Mais que voulez-vous : c’est l’un des titres que j’ai le plus écoutés ces dernières années, un hymne qui sied aussi bien aux soirées un peu moroses qu’aux instants où se défouler devient une nécessité.

Adolescent, j’aimais la musique mais je ne m’identifiais ni aux chanteurs ni aux chanteuses. C’est dans le cinéma que j’allais chercher ce besoin viscéral de se trouver des modèles. Plus je vieillis, plus la balance tend à s’équilibrer. Des chansons plus ou moins profondes m’aident à avancer dans la vie. De Jenifer à Hanson (dont je me suis fait tatouer le mmmbop en début d’année), je me suis construit une série d’hymnes et de mantras à emmener partout avec moi. Mon principal fournisseur : Rock Plaza Central, groupe venu de Toronto qui connut une relative heure de gloire entre 2007 et 2010, année de sa séparation. Il y a deux ans déjà, je choisissais leur Anthem for the already defeated parmi mes trois chansons de l’année. ils n’ont véritablement pas cessé de m’accompagner depuis.

Cette sensation de plus en plus tenace de voir le monde s’écrouler et de ne rien pouvoir y faire. Pas super fortiche en géopolitique, j’ai cependant assez de neurones pour comprendre à quel point c’est le merdier un peu partout dans le monde. Des gens meurent en masse pour des raisons absurdes, d’autres enveniment la moindre situation au nom d’une quête assoiffée de pouvoir, et le pire, c’est que les super-héros n’existent pas. Là non plus, ça n’est pas très Playlist Society dans l’âme, mais la chanson Raymonde de Maxime Le Forestier me semble être un descriptif assez idéal de ce que je ressens lorsque je m’assois pour réfléchir au monde dans lequel mes enfants vont grandir.