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TWO LOVERS de James Gray

Par Benjamin Fogel, le 08-12-2008
Cinéma et Séries

La première fois que j’ai vu « Little Odessa » le premier film de James Gray, je devais avoir 15 ans. Qu’est-ce qui avait pu me pousser à voir un tel film ? Une bonne critique dans Première ? La présence de Tim Roth (je devais être dans ma période post « Reservoir Dogs » à l’époque) ? Je ne me rappelle pas des conditions mais je me souviens combien ce film m’avait marqué par sa tristesse et par son poids des traditions.

13 ans après son premier film, mais seulement un an après son dernier, James Gray s’attaque pour son quatrième long à une histoire d’amour. Avant même de parler du fond, il faut bien comprendre que c’est avant tout la forme qui cloue sur place. Dans « La nuit nous appartient », Gray confirmait déjà sa montée en puissance technique en terme de réalisation notamment au travers d’une étonnante course poursuite qui restera à jamais comme l’un des moments forts de 2007. Dans « Two Lovers » pas de scène aussi spectaculaire mais une constante parfaite dans la beauté des plans. Les contre-jours sont fantasmagoriques et la puissance des dialogues est décuplée par une mise en scène inventive pleine de plans séquences et de cadrages ambitieux (cf les scènes sur le toit). James Gray peut enchaîner d’une seconde à l’autre un montage nerveux et une ambiance oppressante comme lors de la scène de la boite de nuit. De plus, une fois de plus, il n’a pas son pareil pour mettre en valeur le carcan des traditions et de la famille sans pour autant jamais dénigrer l’amour des parents qui est au coeur de cet univers. Et au milieu de tout ça, il y a New York, un New York de 2008 mais qu’on jurerait issu du début des années 90 : Un New York froid, opaque, inhospitalier et en même temps si vrai, si riche, plein d’histoire ; un New York où les enfants de 35 ans vivent encore chez leurs parents et où être juif est plus une question de culture que de religion.

Au niveau du fond, on suit Joaquim Phoenix, ni héros, ni anti-héros, un type un peu dépressif mais qui sait aussi être plein de charisme, artiste à ses heures tout en étant souvent juste un mec banal. Il transcende le film du début à la fin, criant de vérité et d’émotion. A la fois looser combatif et suicidaire qui tente le tout pour le tout, il n’a que très peu besoin de s’exprimer pour faire passer toute la profondeur de son personnage ; un simple regard sur un couple dans le métro en disant bien plus, bien que sans effet appuyé, sans lourdeur, en toute simplicité. Joaquim Phoenix est si grand qu’on ne peut croire en sa décision de mettre un terme à sa carrière d’acteur.

L’histoire d’amour avec Gwyneth Paltrow (qui s’en sort à merveille, bien plus énigmatique qu’à son habitude), n’a pas vocation à faire dans l’originalité, car justement ce qui fait la force de « Two Lovers » et qui est responsable de la tristesse qu’il dégage, c’est le côté commun de cette histoire, cette loose affective que tant de gens connaissent si bien.

« Two Lovers » aurait pu être sous-titré « Suicide ou Résignation » soit une belle métaphore de ce qu’est l’amour au XXIème siècle.

Note : 8,5/10