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WRESTLER de Darren Aronofsky

Par Benjamin Fogel, le 26-02-2009
Cinéma et Séries
« The Fountain », le précédent Darren Aronofsky m’avait profondément marqué, non pas pour le film en soi qui malgré son trip visuel et émotionnel, allait beaucoup trop loin dans la grandiloquence et se laissait dépasser par une ambition que les épaules du jeune réalisateur ne pouvait encore assumer (Matthieu G et moi n’avions pu masquer notre amusement devant certaines scènes), mais bien pour le parcours de Darren Aronofsky qui, persuadé du potentiel universel de son histoire, s’était battu corps et âme pour voir son projet aboutir. Bref, quelque soit, ses défauts, « The Fountain » était une preuve incontestable de l’amour de Darren pour le cinéma (et pour la drogue aussi, je vous l’accorde).

Après l’échec commercial de « The Fountain », « The Wrestler » s’annonce comme son antithèse. Film complètement indépendant qui sent bon l’auto-production, il est très loin des effets de style proposés par « Pi » et « Requiem For A Dream ». Cependant il n’en est pas moins stylisé. Filmant Mickey Rourke de dos, comme une icône, prête à monter sur le ring à n’importe quel moment, comme une icône qui traverse la vie comme un couloir précédent les acclamations du public, Darren dévoile une sensibilité et une finesse des plans inestimables pour un réalisateur qui maîtrise déjà comme lui la technique. Ainsi, on se dit que « The Wrestler » aurait pu être le film fauché d’un Fincher.

Bien évidemment, lorsque vous souhaiterez emmener vos amis voir ce film, ils vous rétorqueront qu’ils n’aiment pas les films de boxe du genre de Rocky. Dans cette situation, le mieux est évidemment de changer d’amis. Ici la thématique du catch n’est qu’un prétexte, un terrain de jeu idéal qui de par sa violence et sa fraternité permet de développer le vrai thème du film, celui d’un homme seul qui n’a que sa passion pour survivre. Mickey Rourke n’est ni un héros, ni une figure qui se démarquerait par sa personnalité, sa volonté, son courage, c’est juste un américain moyen, et il est traité comme tel sans jugement, sans complaisance. Il pose une question centrale de la vie, comment continuer de vivre quand en vieillissant l’espoir diminue, que la solitude se fait de plus en plus présente, et que la maladie vient rappeler combien l’on n’a personne à se raccrocher. A cette question le film répond qu’il faut se rattacher à ce qu’on peut. Certes il y a un côté pathétique à voir Mickey Rourke se saigner chaque fois un peu plus sur le ring pour prouver qu’il n’est pas has been. Une vraie pitié se dégage de ces scènes où vieillissant, il cherche quand même à donner le change, à retrouver l’adrénaline qui l’a porté jusque là.

Il y aurait beaucoup à dire là dessus, notamment sur cette scène où un parallèle est fait entre Randy et Cassidy, où d’un coup la caméra commence à filmer de dos son personnage féminin comme son personnage masculin pour souligner un peu mieux le « différente vie, même désespoir », car « The Wrestler » est un film riche en idées, à la fois chronique d’un quotidien ordinaire et extraordinaire, à la fois simple et complexe.

A part un côté misérabiliste parfois un peu trop prononcé et certaines scènes qui tirent trop vers le pathos (les scènes avec sa fille), le film reste un bel objet intriguant, plutôt étrange malgré le réalisme de son histoire. Il marque en tout cas dignement le retour de Darren Aronofsky dans le clan des plus grands réalisateurs contemporains.

Note : 9/10