Aa
X
Taille de la police
A
A
A
Largeur du texte
-
+
Alignement
Police
Lucinda
Georgia
Couleurs
Mise en page
Portrait
Paysage

STAR TREK de J.J Abrams

Par Benjamin Fogel, le 07-05-2009
Cinéma et Séries
Si j’avais été journaliste dans un grand magazine, disons « Le Monde », « Technikart », ou bien « Elle » et que j’avais du écrire une courte et synthétique chronique du Star Trek de J.J Abrams en me prêtant au jeu du sensationnalisme et en acceptant de jouer selon les règles des journalistes professionnels, j’aurais hésité entre trois titres, trois titres pour trois courtes critiques aux approches différentes mais aux conclusions similaires. C’est vrai que c’est important de choisir un vrai titre pour son article lorsqu’on est un journaliste professionnel. Moi qui ne suis que blogger, je prends toujours comme titre de mes articles le nom de l’œuvre et de l’auteur, et je me rends bien compte à quel point ce n’est ni très original ni très professionnel. Donc voilà, Playlist Society se réinvente pour une triple chronique avec des vrais titres !

Un remake raté de Star Wars. Le projet de J.J Abrams était, avouons le, un brin ambitieux : un remake des six épisodes de Star Wars condensés en un seul tout en se permettant de jouer avec le scénario original, il fallait quand même oser !!! Le film débute sur une courte intro qui explicite le contexte à la fois temporel (il y a bien longtemps) et spatial (dans une galaxie lointaine) puis si le premier quart d’heure semble un peu décousu, tout s’éclaire dès que l’on réalise que dans ce remake (compression en un seul épisode oblige) Anakin et Luke Skywalker seront un seul et même personnage qui se fera appeler Kirk. Le film s’en tient ensuite à la mythologie : Kirk, donc, conduit des bolides sur sa planète d’origine ; l’idée de remplacer Tatooine par l’Iowa étant des plus judicieuses, tant ces deux contrées égarées ont en commun. Après un bref passage au bar peuplé, comme il se doit, d’extra-terrestres, Kirk rencontre rapidement Ian Solo et son énorme vaisseau rebaptisé l’Enterprise. Ian a moins de sex-appeal que dans la version originale mais il finira quand même par se faire la seule femme du film. Toute la partie géo-politique qui fait le charme de Star Wars est bien conservée : ancienne république, fédération des planètes unies, alliance rebelle, on ressent bien tous les tenants et les aboutissants et la complexité diplomatique qui y est liée. Mais très vite J.J Abrams perd le fil. Au bout d’une heure, le film passe un gap et reboot directement sur « l’Empire contre-attaque ». Kirk atterrit sur une planète de glace inhospitalière où il devra se battre avec un gros monstre sans son sabre laser. Vient alors la rencontre avec Yoda qui est plus grand, moins vert mais tout aussi vieux et sage. Puis via une légère pirouette scénaristique à coup de télétransportation (tellement plus efficace que la vitesse lumière), c’est « Le retour du Jedi » en mode on va botter le cul de l’Etoile Noire. Dès qu’il arrive sur place, Kirk pousse Dark Maul dans le vide avant de se frotter à Dark Vador. Les bruitages sont très bien faits et on reconnaît parfaitement le fameux souffle du plus grand méchant de l’histoire (enfin, plus grand méchant, derrière Hitler quand même, hein). Le problème c’est que dans cette version Anakin (Dark Vador pour ceux qui n’ont pas vu la version originelle) et Luke ne font qu’un. Du coup lorsque Kirk tue Dark Vador cela crée une anomalie temporelle comme l’avait d’ailleurs prévu un peu plus tôt Yoda. Et ce trou dans l’espace-temps nous ramène dans le passé à l’époque où l’épisode 4 de Star Wars n’était même pas sorti. Bref cela n’a ni queue ni tête. De quoi rendre furieux tous les Trekkies du monde ! Et puis putain merde où est Chewbacca ???

Une synthèse baclée de toute la mythologie SF contemporaine. S’inspirant bien heureusement de l’univers originel de Star Trek, la version de JJ Abrams n’en va pas moins chercher ses références partout où elle peut. Alors oui on pense à Star Wars mais aussi à d’autres références un peu inavouables comme Stargate SG1 comme, par exemple, lors de cet infâme combat sur la foreuse où on a l’impression de voir Jacky Chan se battre contre un Goa’uld. Heureusement le film présente l’avantage d’être un prélude à toute l’histoire de Star Trek et se permet de développer un Kirk et un Spock légèrement plus intéressants, psychologiquement parlant, que dans l’histoire de base. En revanche toute la partie anthropologie et découvertes de nouvelles espèces a été complètement éludée. Quand aux personnages secondaires, à part Simon Pegg, qui vient faire son show, on ne peut pas dire qu’ils relèvent le niveau. C’est presque du Starship Troopers au premier degré (Starfleet quelle blague, lol), et au final on se dit qu’il y a plus de choses dans le pilote de Battlestar Galactica que dans tout ce film. On en finit même par se demander si Star Trek en général, c’est pas un peu de la merde. De quoi détruire pas mal de bons souvenirs.

Un film en forme de pilote de série TV. Ce qui marque le plus dans cette nouvelle version de Star Trek, c’est combien le film est plus proche de l’univers télévisuel que de l’univers cinématographique. Rien d’étonnant à ça, puisque JJ Abrams est le bien connu créateur de « Alias » et « Lost ». Le problème c’est qu’un très bon créateur de série ne fait pas un bon réalisateur, au point qu’on se demande pourquoi il n’a pas inauguré une nouvelle série plutôt que de se lancer dans ce blockbuster sans âme, où l’on nous raconte en 2h une histoire qui aurait du en prendre 10. Une série aurait permis d’entrevoir Vulcain et ses 6 milliards d’habitants parce que là, sorti des sages, on a un peu l’impression que personne n’y habite. A moins que ce soit un problème de budget et non de temps. Enfin bon tout ça ressemble fort à un pilote, et je n’ai pas encore abordé toute les accointances avec les séries actuelles. Par exemple, le coup de Zachary Quinto qui cale son personnage de Spock sur celui de Sheldon dans Big Bang Theory ; c’est un peu le serpent qui se mord la queue, non ? Et quand il prend Chris Pine à la gorge, il reprend tellement son personnage de Sylar qu’on a presque peur que Kirk se fasse ouvrir la tête. Où je veux en venir, c’est qu’au final on se demande si J.J Abrams n’aurait pas du rester ce qu’il était, c’est-à-dire un excellent créateur de série. Dans cette hypothèse, il nous aurait épargné de trahir l’ambiance Star Trek et de transformer le mythe en un vulgaire divertissement bourré de fautes de raccords et de méchants ridicules (oui, car pour ceux qui en doutaient Eric Bana n’aura pas l’Oscar pour sa prestation de Nero.)

Note (commune aux trois critiques) : 2/10