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Des cendres d’O! The Joy apparaît un phœnix incandescent. Dès « A day in the dark » un frisson m’a parcouru, la sensation d’une nouveauté qui venait se coucher sur des sonorités rassurantes et bien connues, une nouvelle version de chez soi, un souvenir amélioré. Croupissant dans son Nevada natal, il semblait que la voix de Jonah Wells était en gestation, dans l’attente de la rencontre qui lui permettrait enfin de s’exprimer. Car il fallait plus qu’une simple guitare acoustique folk pour permettre au chanteur d’explorer son champ des possibles, il lui fallait Goings et Marcelli de O ! The Joy.

A l’époque de la sortie de « Zen Mode », O ! The Joy ne m’avait que partiellement convaincu. La qualité était indéniablement présente, mais le groupe me semblait noyé dans une masse grandissante de groupes qui ne possèdent pas le truc en plus pour se démarquer, l’éclair de génie… ou dans le cas présent l’éclair vocal. Bien que fraîchement composé, le trio a sorti avec « What if All the Rebels Died ? » un classique instantané qui égaye mes matinées, accompagne mes écrits et rassure mes nuits.

« Don’t go to far » permet de retrouver les habitudes math rock de ses compositeurs, mais le tout enchanté par la voix de Wells, comme si un jeune folkeux à la Conor Oberst se découvrait une passion pour des groupes comme Tortoise, Don Caballero, ou encore Hella. « Ex oh » aurait pu être un hymne indie rock mais Jeepster préfère en dire le minimum, ne pas parler inutilement, ne pas reproduire deux fois le même plan, et le titre se termine en moins de deux minutes. Cette concision dans l’écriture est indéniablement une des forces du trio.

« Write the end first » possède lui aussi une intro typée math rock, et laisse tranquillement sa guitare monter la puissance, sans en faire trop, mais en confectionnant un savant dosage qui prend à la gorge jusque ce qu’il faut. En fait on est très vite étonné par le fait qu’un groupe avec une telle approche technique puisse sonner si pop, c’est définitivement la réflexion qu’on se fait en écoutant « Sweet 1:23 ». « You can’t stop » s’ouvre sur un solo de batterie jazzy et se transforme bien vite en imparable single. « Ditches » est une magnifique ritournelle à la fois pop et math-rock dont l’instrumentation hypnotise tellement qu’on est presque surpris d’entendre Jonah Wells intervenir à 1 min 45. Encore une fois la concision est au rendez-vous.

« Fiction fiction » laisse les guitares prendre le dessus, quasi grunge dans les mélodies, pas si éloigné que ça d’un Dinosaur JR, Jeepster tape une fois de plus en plein cœur en juste 2 minutes. Tout ça passe trop vite. Heureusement l’album finit sur un titre éponyme qui montre que le groupe sait à l’envie rentrer dans des formats plus conventionnels.

« What if All the Rebels Died ? » dure peut être moins d’une demi-heure, mais il s’agit d’un tel concentré, d’un nectar brut, d’un shot de vodka avec un fond de sirop de caramel. C’est court mais ça ce consomme et se reconsomme à l’infini.

De temps en temps, il est bon de croire et de croire seul, de voir dans un disque un des chefs d’œuvres de l’année, même si l’on sait très bien que les raisons qui nous font aimer ce disque sont internes et personnelles. Voilà, je me sens bien chez Jeepster. Cet équilibre entre émotion et technique, cet aspect instinctif sans pour autant fuir les expérimentations, ce jeu sur les non-dits et sur la nécessité de se taire au moment opportun, forment finalement une bonne synthèse de ce que j’aime en musique.

Note : 9/10

En écoute sur https://www.myspace.com/thebandjeepster