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Converge a depuis bien longtemps gagné sa place au panthéon de mes groupes cultes. Concrétisant à lui tout seul vingt ans de recherches sur le comment repousser les limites sonores tout en restant audible, il symbolise tout une frange extrême du métal et du harcore. Aussi artistique que primitive, leur musique est un véritable exutoire. Souvent mes amis essayent de comprendre. Que puis-je trouver dans ses cris ? Que puis-je apprécier dans ce déluge de blast ? Y a-t-il un intérêt humain à s’infliger de telles souffrances ? Je me lance alors dans un plaidoyer qui ne tourne jamais à mon avantage. Je parle de la technique, de l’héritage jazz-core, je présente l’approche totale de la démarche (dont les pochettes d’albums réalisées par le chanteur Jacob Bannon), j’use de comparaisons, je dis qu’il s’agit du Radiohead du Hardcore… Mais rien y fait, personne ne ressent la pourtant inévitable déflagration que déclenche le groupe sur chaque titre.

L’agilité des doigts de Nate Newton, la vitesse de frappe sur les fûts, la folie du riff… dès « Dark Horse », Converge hurle son retour. Un retour non désavoué par « Reap What You Sow ». La chanson éponyme est du Converge pure souche, un single un peu difficile d’accès qui est loin d’être le titre les plus friendly de « Axe to Fall ». « Effigy » est un split avec Cave In où Steve Brodsky, J.R. Connors et Adam McGrath viennent dédoubler la rage (le groupe vient d’ailleurs de sortir le très bon EP « Planets of Old »). Tout y est démesuré, extrême, poussant le groupe dans ses derniers retranchements.

La noirceur se dégageant lorsque le groupe ralentit le tempo se manifeste au travers de « Worms Will Feed » ; Jacob Bannon y paraîtrait presque apaisé dans le sens où l’on distinguerait presque des mots sous les cris. L’inouïe maîtrise instrumentale du groupe lui permet de caler entre deux assauts soniques des ambiances post-hardcore. Comme si Kurt Ballou n’était pas assez énervé, le groupe fait intervenir Ulf Cederlund sur « Wishing Well ». « Damages » transcende la puissance de par ses accélérations (ter)riffiques avant de déployer le chaos.

« Losing Battle » est un euphémisme, tant ne serait-ce que défier le groupe serait suicidaire sur ce titre très punk-à-chien. « Dead Beat » est une incroyable démonstration technique où Ben Koller essaye de gagner du terrain sur son guitariste, en exacerbant la subtilité du jazz dans un jeu des plus violents. La montée en puissance ne s’arrête pas là « Cutter » puis « Slave Driver » affirme la domination de la machine de guerre en rappelant même les mélodies du fabuleux « United Nations ». « Cruel Bloom » est peut-être la première ballade de l’histoire des bostoniens. Bannon se risque à l’exercice en compagnie de Steve Von Till de Neurosis et le pire c’est que sans être mémorable, le titre s’affirme comme un joli moment de dark folk aussi fantasmagorique que du DM Stith. « Axe to fall » se clôture sur « Wretched World » magnifique titre de post métal ambiant qui ne délaisse pas les expérimentations et où Mookie Singerman le leader de Genghis Tron vient poser sa voix désenchantée.

A chaque opus, Converge semble à la fois repousser les limites de la violence et de la technique, tout en s’ouvrant toujours un peu plus sur d’autres styles. Incroyablement varié, sans pour autant jamais renié son identité, « Axe to Fall » est un pas de plus vers le sublime pour Converge. Aussi complexe que « Jane Doe » et aussi rentre dedans que « No Heroes », ce nouvel album consolide la légende. Converge trône tout en haut de la pyramide du hardcore et semble comme toujours intouchable.

Note : 9/10

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