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Il me parait assez déplacé de dire à un artiste qu’il possède une vision inexacte de son œuvre, de prétendre savoir mieux que lui comment doivent se positionner ses chansons. Pourtant, quand j’entends Marie Flore parler de son « mini-album », mon poil s’hérisse, mes sourcils se froncent, je m’offusquerai presque. Est-ce par pudeur, par fausse modestie ? Qu’est ce qui peut pousser la chanteuse à parler de « More than thirty seconds if you please » comme d’un mini-album ? Se voile-t-elle la face ou joue-t-elle d’humilité ? Je ne sais pas mais autant que les choses soient claires : « More than thirty seconds if you please » n’est ni une simple mise en bouche, ni un avant-goût d’un bonheur futur. Il s’agit d’une œuvre à part entière, d’un premier album magique, qui tout comme les 7 titres du The Enemy de Centenaire ne doit pas être traité comme autre chose.

Pureté de l’épuration ou épuration de la pureté, Marie Flore est une promesse glaciale de délices émotionnels dont « Trapdoor » est la porte d’entrée que nous cherchions désespérément depuis si longtemps. Sur « Dizzy » la guitare se fait psychédélique et le voyage commence porté par cette voix si fragile qu’on a peur à chaque instant qu’elle nous échappe des doigts. La chanson dure moins de deux minutes mais en dit plus que beaucoup d’albums de folk bucolique ennuyeux. Derrière ses formats courts, derrière son improbable simplicité, la jeune française irrigue ses chansons d’une richesse mélodique qui désarçonne à chaque instant (« Sweet to the taste »).

Abandonnée dans la nuit, sa voix se dédouble, un alter-ego chuchote dans son dos et les aigus posés sur cette douce couche n’en sont que plus poignants (« Empty Walls »). « While you where there » n’a rien à envier à la rage sensible de Pj Harvey tandis que « Half past three » m’oblige à me recroqueviller sur moi-même comme un gamin perdu et apeuré et ce avec seulement trois notes de guitares. « Twist me round your little finger » ne possède pas de canevas, pas de chemin tracé, les notions de couplets et de refrains sont d’un autre temps lorsque l’on possède une telle fluidité d’écriture. L’album se clôture sur « The soft divide » composé avec les Rare Birds de Gregg Foreman. Marie Flore y relève même le défi de susurrer des mots en français créant ainsi un pont entre les grands espaces de The Limes et ce que Biolay est capable de faire de mieux.

Certes « More than thirty seconds if you please » n’a pas été enregistré d’un trait, certes il s’agit de collage de chansons ayant chacune leur propre existence, certes il ne possède que huit titres, mais en moins de 25 minutes Marie Flore nous conte le passé, le présent et le futur de la folk, sans fioriture, sans prétention, sans en dire plus que le strict nécessaire.

Envoyer un mail à Marie Flore, saisir quelques chiffres sur Internet, recevoir une lettre, glisser le disque dans sa platine, se délecter… voilà une manière de consommer la musique qui me sied ford bien.

Note : 8,5/10

>> A lire également, la critique de Mauve sur Violette Roll et la critique de Mathieu sur Arbobo