Aa
X
Taille de la police
A
A
A
Largeur du texte
-
+
Alignement
Police
Lucinda
Georgia
Couleurs
Mise en page
Portrait
Paysage

C’est incroyable comme l’homme oublie vite, comment une nouvelle habitude prend le pas sur l’ancienne, comment l’intensité du présent peut vous faire oublier un amour du passé. Mais quelles que soient nos faiblesses humaines, il y a toujours un manque indolore qu’une simple scène, qu’un simple effluve peut pourtant faire renaître. J’ai ainsi eu tendance à oublier ces derniers temps combien l’abstrackt hip hop avait joué un rôle important dans mon initiation musicale, comment il avait réussi à donner du sens et à réunir des courants qui s’opposaient chez moi. Après avoir écouté avec dédain le nouvel album de Blockhead, il me fallait bien ce second opus de Reverse Engineering pour raviver mes souvenirs.

Les voix electroniques dialoguent avec des samples orientaux, les beats fusent comme chez Warp (« Highly Complex Machinery »). L’entrée en matière ne laisse que peu de doute, Reverse Engineering reconstruit avec « Miracle That Glows » le pont entre les boucles electroniques de Sixtoo, les expérimentations d’Anticon, et le sens de l’alchimie de DJ Vadim. Pas très étonnant avec tout cela de retrouver M Sayyid d’Antipop Consortium et de Airborn Audio sur trois titres, et Blu Rum 13 de One Self sur deux. Si je suis un peu moins sensible au flow féminin de Diyala qui a par moment tendance à se croire un peu trop sur un album de Limp Bizkit (« World In Reverse »), je reste persuadé que le diptyque « Fly » et « Defiance » attise le feu avec brio.

Entre les morceaux les plus hip hop, on retrouve de l’électronica ambiante aux beat lourds et aux accointances trip hop (« Instant Art »), on observe des boucles qui s’unissent comme sur un vieux Dj Krush (« Romeo Echo »), des expérimentations qui finissent toujours par se laisser dominer par les mélodies (« Six Clicks »). C’est la force du style : ne jamais être trop intrusif et toujours trouver le juste dosage entre les différents courants (« Harmosorus »).

On regrettera juste que le trio helvète n’évite pas toujours les passages obligés du genre avec quelques moment convenus qui pourraient laisser poindre un certain manque d’originalité. On aimerait parfois y sentir plus de liberté par rapport aux maîtres du style et y croiser des envolées techniques à la Depth Affect.

« Highly Complex Machinery » se termine sur une confrontation entre les deux MC phares de l’album (« Future Shock »). Les deux descendants légitimes du trône y combattent jusqu’à la mort dans une arène déchaînée. Il n’y aura pas de perdant, pas de vainqueur, juste un public à genoux, le souffle coupé mais le cœur rempli.

S’imposant non seulement avec aisance comme un digne compagnon de route pour Antipop Consortium, Reverse Engineering permet surtout de faire remonter à la surface un trésor que les « nouvelles tendances » avaient englouti.

Note : 8/10