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Lucinda
Georgia
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Un batteur autiste et épileptique se démultiplie à l’infini sans pour autant poser. Jamire Williams (qui a déjà joué avec Kenny Garrett et Robert Glasper) livre une prestation dantesque et donne l’impression de s’être lancé seul dans un solo contre la mort (« K.K.P.D »). Pourtant qu’on ne s’y trompe pas, son unique objectif est de mettre en valeur la trompette de Christian Scott et son message à l’encontre du Ku Klux Police Department !

Tout comme les géniaux The Bad Plus qui engendre à chaque album des reprises (de Radiohead à Nirvana en passant par Wilco), Christian Scott ne cache pas son attrait pour les autres sphères musicales. L’exercice de la reprise est d’autant plus salvateur ici que la version de « The Eraser » offre un nouvel axe de lecture à l’original et démontre si besoin en était que le trompettiste est on ne peut plus en phase avec le monde actuel, et refuse l’aliénation qui est souvent le lot des jazzmen.

Du haut de ses trente ans et de ses deux premiers albums (« Rewind That » et « Anthem », également chez Concord Records), Christian Scott a su se créer un style ultra personnel qu’il pose aussi bien sur des compositions jazz-fusion que jazz-soul. Le son est chaud au point de s’évaporer. Il se dégage un flou de la trompette comme si l’américain cherchait à vous susurrer à l’oreille le moindre de ses ressentis (« Isadora »).

Neveux du saxophoniste Donald Harrison Jr et fils spirituel de Mile Davis, Christian Scott est une inattendue bénédiction qui replace le jazz au cœur de tous les débats et de toutes les attentions, de par sa capacité à s’inscrire dans la grande histoire du jazz classique tout en offrant toujours un deuxième niveau de lecture plus contemporain (« American’t »).

« Yesterday You Say Tomorrow » est un acte socio-politique qui rappelle la contribution signifiante qu’a eu le genre dans l’histoire de l’Amérique (le précédent opus traitait d’ailleurs de Katrina). Il s’agit d’une vraie tribune à idées instrumentales et à discours sans mot. Le débat fait rage mais tout le monde peut s’exprimer librement. Le piano s’enflamme et se positionne sans négociation possible en faveur de la Nouvelle Orléans (« An Unending Repentance ») tandis que la guitare dresse un portrait au vitriol de la politique économique américaine (« The Roe Effect »).

La guerre n’est pas finie et le peuple vient de trouver un nouvel étendard.