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Il y a 6 ans, les mots nous oppressaient et on ne trouvait plus le sommeil ; Abstrackt Keal Agram invitait Arm sur son « Et La Nuit S’éternise » et l’abstrackt hip hop français renaissait. Il y a 4 ans, l’initiative Soul’Sodium mettait à feu et à sang la notion de collectif et émulait le sens des formules sans négliger la technique ; pour la première fois Arm et Iris mélangeaient leur jonglage lyrique. Il y a 2 ans, les guitares frappaient de plein fouet, et Iris & Arm se retrouvaient dans le cadre plus intimiste de Psykick Lyrikah ; l’alchimie était telle qu’on se demandait pourquoi le second ne devenait pas membre permanent.

Si cet album du nom de ses MCs est un vrai disque de hip hop, ce n’est pas tant grâce à son flow et à ses beats mais bien à son esprit, un esprit de famille où chaque disque est un Thanksgiving, un moment où les lignes font un crochet pour s’assurer de se croiser en un point unique ; ici seul Sept manque à l’appel.

Premier pas, premier passage, premier retour dans la famille, la production de « Minuit pile » est sans appel, Lionel Pierres, aka My dog is gay, aka Fortune, aka la motié de Abstrackt Keal Agram, lance une instru dans le pur style qui a fait sa renommée. Au milieu de la nuit noire violée par les points extrêmes, les mots remontent à contre-courant en jouant des coudes et redessinent les origines. Ici on combat avec les mêmes armes, à la rhétorique politique on répond par la poésie sociale, lettrée, affutée sans jamais être condescendante. Et lorsque les mots ne suffisent plus, la mélancolie des beats apportent la preuve irréfutable que tout va mal (« Plus j’approche ») : On a des mondes que des mondes séparent…

Instrumentation d’obédience indus du compagnon de toujours Robert le Magnifique, Iris joue avec les proverbes de notre langue et conte un nouveau monde où les expressions ont la finesse d’esprit de ne jamais livrer leur dernière partie trop implicite (« Le lièvre »). Dans cet univers dévasté et ravagé par des années d’imagerie putassière, Iris & Arm n’ont jamais baissé les bras. Ils évitent les provocations, sauvent les interludes, bravent les interdits et deviennent le bastion fragile mais tenace du genre (« Les temps perdus »).

Fermez les yeux aussi et merci pour tout
Vous ne souffrirez d’aucune incidence future
Dans ces turbulences on a tranché pour vous
Sens-tu la tourmente sans commune mesure ?
Les eaux dorment… les réseaux mentent à tout rompre
Ce sont des réponses aux monstres fondements
Qui tout bonnement se défendent de tout manquement
Les vents se lèvent laissant l’histoire en l’état insufflant leur nectar dans les tuiles
Et l’espoir des villes… Balayé d’hectares en hectares et pire dans les gestes qui suivent
Sens-tu la distance ? L’insistance ?!

Pris dans la bourrasque des « courants forts », l’homme a les genoux qui fléchissent et les yeux qui se plissent ; il faiblit. Le vent s’engouffre, enraye son arme sans sécher ses larmes ; il vacille. Les volets se ferment, les magasins se vident, les voitures se criblent ; ils suivent les ordres. Iris & Arm résistent, nous ne pouvons les aider, notre action serait vaine. Plus qu’une seule chose à faire : courir… courir vite.

Note : 7,5/10

>> Quelques titres en écoute sur Bandcamp
>> A lire également, l’interview de Iris & Arm par Neska sur Adikt et la critique de Sfar sur Toujours un coup d’avance