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Lucinda
Georgia
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Portrait
Paysage

Miami, 1963.

Bronson,

Je n’irai pas cracher sur ta tombe, je préfère largement garder ma salive pour échanger quelques fluides corporels avec une beauté de passage. J’ai eu beau changer de visage au prix d’une opération qui m’aura coûté un joli paquet de biffetons, tu n’as pas daigné me lâcher les basques. Tu l’as payé de ta vie, sale merde.

C’est sûrement pas tes sbires dégénérés, dont la somme des QI atteint à peine la valeur de ma température rectale les jours de fièvre, qui auraient pu m’empêcher de te régler ton compte. Tu voulais certainement jouer la princesse dans ton château de brique, mais au lieu de recevoir un petit bisou du prince charmant, pas de bol, Bronson… C’est moi, Parker, et mon fidèle Handy qui sommes venus te délivrer du mauvais sort, le mauvais sort que tu t’étais connement jeté sur toi-même en mettant un contrat sur ma peau. C’est le baiser du Diable, Bronson, celui qui mène tout droit en enfer.

Tes potes de l’Organisation vont pas te pleurer longtemps.  Ces vautours se sont réjouis d’avance de siffler la fin des hostilités, à condition que je t’expulse du terrain de jeu. On n’est jamais aussi bien trahi que par les siens, crois-en ma longue expérience.

Ils en avaient marre, tes compères, tu vois. Mon pouvoir de nuisance a été décuplé par ta volonté stupide de me régler mon compte. Alors, j’ai tapé là où ça vous fait le plus mal : le portefeuille. Quelques gars bien intentionnés se sont fait un plaisir d’effacer la dette qu’ils avaient à mon égard en joignant l’utile à l’agréable. Ils se sont bien servis, les rapaces, dans vos bouges pourris et vos casinos pour petits commerçants en mal de sensations fortes du samedi soir. C’est que je les connais, toutes vos combines de paris clandestins, de transferts de cash ou de couverture de bookmakers. J’ai lâché mes chiens sur tes caniches, et les caniches vexés ont été tentés de mordre la main de leur maître. Le maître, c’est toi. Correction :  C’ÉTAIT toi.

Ce qui m’emmerde le plus dans toute cette histoire, c’est que j’étais peinard à Miami, en train de me refaire une virginité avec une poupée qui l’avait perdue depuis longtemps. Quelques coups en prévision, histoire de renflouer mon compte passablement éprouvé, du soleil et quelques rasades de Cuba Libre… J’aimais bien mon nouveau programme des réjouissances. Tu m’as contraint à interrompre mes vacances, Bronson… Je déteste les changements de scénario et les plans merdiques, tu le savais pourtant bien. Dans ces cas-là, j’en reviens à ma triste nature : implacable, froid, la tête haute et le poing serré sur un flingue.

Je n’aspire plus qu’à la paix des braves avec la bande de bras cassés qui vont assurer ta succession, Bronson. Ils auront, j’espère, l’intelligence des lâches qui consiste à s’attaquer à plus faible qu’eux. Je crois que j’ai prouvé qu’il fallait pas me chier dans les pompes, faute de quoi les mesures de rétorsion peuvent s’avérer aussi définitives que celles qui t’ont menées au cimetière.

Rendez-vous en enfer, Bronson. Je compte y faire un tour le plus tard possible, et s’il faut t’expédier des camarades de jeu auprès du Diable, sache que je n’aurai aucun état d’âme.

Avec mes regrets éternels (non, je plaisante).

Parker.

Note : 9/10