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Depeche Mode #5 : Sweetest Perfection

Par Olivier Ravard, le 02-12-2011
Musique
Cet article fait partie de la série 'Depeche Mode' composée de 7 articles. L'équipe de Playlist Society raconte son histoire Depeche Mode. Voir le sommaire de la série.

Il y a les groupes vénérés et les groupes dont on a tendance à se foutre complétement.
Et puis il y a les groupes semi vénérés.
Ceux là sont portés aux nues par les uns et poliment moqués par les autres.
Aujourd’hui encore, il en existe, des adolescents pour vous affirmer sans ciller que Depeche Mode est un pathétique boys band vieillissant. Aujourd’hui encore, il en existe, des adultes sains d’esprit, au goût sûr et dotés d’une éducation peu discutable, pour écouter Depeche Mode dans la ferveur muette du croyant convaincu. Ce qui prouve bien que Depeche Mode est un groupe semi vénéré.
Comme d’autres avant lui, le groupe Depeche Mode a entamé sa carrière sur une bien belle arnaque en se faisant passer pour un collectif de garçons coiffeurs promis aux bacs à soldes. Les images datant de l’époque pré Some Great Rewards sont édifiantes mais le patronyme lui-même  laissait présager du pire. Lorsque l’on commence sa discographie en chantant des âneries comme Photographic (“I take pictures, photographic pictures…”, excellent morceau prétechnoïde soit dit en passant), il faut de la magie ou un miracle pour devenir un artiste générationnel.
Heureusement, les membres de Depeche Mode sont dotés des trois atouts qui distinguent l’artiste du garçon coiffeur : le talent, les démons intérieurs et les addictions.
Tout artiste plongé dans l’addiction pour échapper à ses démons intérieurs accouche d’un sommet artistique dont la hauteur est proportionnelle à son talent.
Cette théorie, entièrement validée par moi-même, s’applique avec bonheur au Violator de Depeche Mode en général et au morceau Sweetest Perfection en particulier.
En 1989, Depeche Mode avait amorcé sa phase Rubber Soul depuis au moins Black Celebration, en 1986. Précisons à l’attention des moins beatlemaniaques d’entre vous que la phase dite “Rubber Soul” constitue le moment où, lassé de sa propre légèreté, le groupe, devenu fondateur, entame une sorte de seconde carrière en enchaînant les albums mythiques.
Donc Violator et Sweetest Perfection.
Sweetest Perfection est une excellente chanson, ce qui nous amène à souligner la différence fondamentale entre le garçon coiffeur et l’artiste : le garçon coiffeur a une belle nature de cheveux, l’artiste a de belles chansons.
D’où la stature artistique de Depeche Mode, groupe qui malgré tous ses efforts capillaires, aura toujours eu des chansons plus belles que ses cheveux.
Comme par exemple Sweetest Perfection.
Sweetest Perfection est un morceau chanté par Martin Gore, sur une composition de Martin Gore et des paroles de Martin Gore. Ce qui laisse assez peu de place aux autres membres de Depeche Mode, force est de le reconnaître. Néanmoins, Sweetest Perfection évoque en pointillés et avec une pudeur louable les addictions et les démons intérieurs, ce qui nous amène à souligner que les déboires de David Gahan avec les opiacés ont quand même beaucoup fait pour la mystique de Depeche Mode, au point que toute allusion aux stupéfiants écrite par Martin Gore semblait destinée à son chanteur délabré en quête désespérée d’une rédemption qui ne venait pas.
Ce qui nous amène à l’autre différence fondamentale entre le garçon coiffeur et l’artiste : aussi talentueux soit-il, le garçon coiffeur n’injectera que peu de mysticisme dans son art capillaire, alors que l’artiste, oui.
David Gahan et son chemin de croix, sa descente aux enfers, ses poses de Christ abimé : voilà du mysticisme. Au reste, la religion, le pêché et la rédemption, notions omniprésentes dans l’oeuvre de Depeche Mode, restent fort discrètes dans celle de Franck Provost (c’est un exemple). Franck Provost n’aurait jamais pû composer Sweetest Perfection. Alors que Depeche Mode, oui.
Comme à peu près tous les morceaux de Violator, Sweetest Perfection est un joyau d’une noirceur peu soupçonnable au premier abord, servi dans un écrin confinant à l’épure (la production de Flood, insensée et parfaite). La maîtrise est totale et l’alchimie entre génie pop et expérimentations sonores aura de quoi convaincre les plus dubitatifs.A vrai dire, la carrière de Depeche Mode aurait aussi bien pû s’arrêter sur cet album impeccable. David Gahan aurait pû mourir d’une de ces morts stupides de rock star plongée dans l’addiction pour échapper à ses démons intérieurs, et Depeche Mode aurait pu accéder à l’enviable statut de groupe mythique parti trop vite.
L’histoire, cruelle, en a décidé autrement. David Gahan est toujours en vie. Il faudra attendre encore, avant que Violator ne soit enfin reconnu unanimement comme ce qu’il est : un miracle.

***

L’intégralité de la série Depeche Mode :

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