Aa
X
Taille de la police
A
A
A
Largeur du texte
-
+
Alignement
Police
Lucinda
Georgia
Couleurs
Mise en page
Portrait
Paysage

PS’s playlist novembre 2013

Les PS'Playlist sont des playlist mensuelles où chaque membre de Playlist Society propose un morceau, récent ou ancien, qui l'a marqué ces dernières semaines. Chaque chanson de la tracklist est accompagnée de quelques mots.

Par Collectif, le 30-11-2013
Categories Misc

220px-Berlinloureed 1) Lou Reed – “Oh Jim” (Christophe Gauthier)
Extrait de Berlin – 1973 – Rock surproduit

J’avoue, la mort de Lou Reed m’a un peu secoué. Du coup, depuis le 27 octobre, il ne se passe pas une journée sans que j’écoute quelque chose de lui (y compris Lulu, sa dernière vomissure avec Metallica). Je n’arrive plus à me sortir de la tête les morceaux de Berlin. Oh Jim en particulier. Titre sans véritable mélodie, construit autour d’un seul accord, une sorte de drone dégoulinant de la basse de Jack Bruce. Les cuivres pétaradent (mettre des cuivres sur des morceaux de Lou Reed, il n’y avait bien que Bob Ezrin pour produire un truc pareil), mais l’ambiance est malsaine. Le morceau raconte un bout de la relation tourmentée entre Caroline et Jim, mais il est aussi passablement autobiographique pour Lou Reed quand il parle de ces amis de pacotille qui refilent des cachetons, demandent des autographes et te poussent sur scène pour se marrer. Lou, tu pouvais être le pire des connards, tu n’avais pas produit grand chose de bon depuis des lustres mais tu me manques, putain.

Midlake-Antiphon-2013 2) Midlake – “Provider” (Benjamin Fogel)
Extrait de “Antiphon” – “2013” – “Indie Rock”

J’ai toujours cru que c’était la voix de Tim Smith qui me touchait dans Midlake, et j’avais l’impression que leurs cavalcades, à la fois épiques et lancinantes, ne reposaient que sur elle. Aussi, en apprenant que ce dernier quittait le groupe pour ne plus lui imposer son mal être, j’étais surtout impatient d’entendre son premier album solo. Pourtant, c’est bien Antiphon, le quatrième album de Midlake, avec Eric Pulido, le guitariste du groupe, au chant, qui a accompagné mon mois de novembre. Il s’agit d’une belle illustration de la trop grande importance que l’on attribue parfois à la voix, et de comment l’instrumentation peut non seulement guider celle-ci et la faire sienne, mais surtout concentrer toute la puissance émotionnelle en elle. Antiphon est un bel album, plus libre et concentré que ne l’était The Courage of Others. L’appel des sirènes succède à la complainte des vikings, dans une belle continuité discographique, au sein de laquelle le changement de chanteur aura servi d’impulsion et non de remise en question.

deus-lp 3) dEUs – “The Architect” (Isabelle Chelley)
Extrait de Vantage Point – 2008 – Rock

Mon premier souvenir marquant de dEus, c’est la vidéo de “Roses” qui passait dans “Alternative Nation”, meilleure émission musicale jamais produite par MTV. Elle avait ce côté décadent qui ne peut que séduire quand on a trippé trop tôt sur le Velvet Underground et la Factory. Et puis, il y a “The Architect”, avec ses airs de vieux Depeche Mode, mélodie synthético-rock et paroles nébuleuses comprises. Je l’ai entendue pour la première fois à Anvers, la ville d’origine du groupe et pendant un week-end, elle nous a servi de B.O., passée en boucle dans la voiture de notre amie Nikki ou le soir en fond sonore en buvant un verre. J’écoute trop de musique aujourd’hui pour vraiment mémoriser chaque détail d’une chanson. Mais celle-là, je crois que je la connais intimement.

nisennenmondai n 4) Nisennenmondai – “Appointment (you Ishihara mix)” (Arbobo)
Extrait du EP “N” – 2013 – minimale japonaise

J’aime tellement ce groupe que j’aurais le plus grand mal à décrire à quel point ce trio de japonaises équilibrées, humbles et sympathiques, sont le truc de le plus barjot, le plus dément, fucked up, impressionnant, sidérant et flippant que j’aie jamais vu en concert. Produire une musique minimale d’une telle précision en jouant live sur de vrais instrument est au-delà de la prousse. Ce morceau remixé donne un mince aperçu de Nisennenmondai, s’éloigne de l’original mais dit ce qu’elles sont bel et bien : une machine à faire danser intelligemment. Nisennenmondai = Ghost in the machine!

dj jubilee take it to the st thomas 5) DJ Jubilee – “Back That Ass Up” (Nathan)
Extrait de Take it to the St Thomas – 1998– Bounce

Depuis que je suis rentré de New Orleans, je suis plongé dans le bounce. Sans même en avoir entendu une note sur place, l’ambiance de la ville, les concerts, les danses folles m’ont amené vers ce genre aussi primitif que fascinant. Le concept ? Un sample de soul, un beat, une grosse ligne de basse et un MC qui balance des “shake it like a dog”, pendant que tout le monde se tortille. En boucle. C’était bien avant que Miley Cyrus ne soit née, c’était avant que ce soit considéré comme provoquant, c’était la façon de s’amuser de la Nouvelle-Orléans. Ce titre DJ Jubilee incarne le bounce, et m’obsède complètement. Un sample du “I want you back” des Jackson 5 accéléré, une basse bien sale et Jubilee qui enchaîne les incantations à se le secouer, comme comme un chien, une salière et plein d’autres trucs un peu obscènes. “Gimme some !”

Velvet Underground-loaded-Thierry 6) The Velvet Underground – “Train Round The Bend” (Thierry Chatain)
Extrait de “Loaded” – 1970 – Rock

Le tout premier titre du Velvet que j’ai entendu. Pas forcément majeur, mais le premier. À la radio, et dès sa sortie. Disque de la semaine du fameux Pop Club de José Artur, si mes souvenirs ne me trahissent pas. J’avais 13 ans, je commençais tout juste à m’intéresser vraiment au rock, et ce fut comme l’extrémité d’un fil d’Ariane que je n’ai cessé de dérouler. Comme beaucoup, j’ai été déniaisé par le Velvet. Et pour cela, je resterai éternellement reconnaissant à Lou Reed, trouduc suprême, certes, mais surtout fabuleux portraitiste, guitariste, non-chanteur, défricheur…

INS56314 7) Marine Girls – “Falling Again” (Laura Fredducci)
Extrait de “Extrait de Lazy ways” – “1983” – “post-punk”

Avec peu de moyens, les Marine Girls dessinent des petites mélodies qui s’entêtent, et dont la douceur accompagne à merveille les matins de novembre, avec son cortège d’émotions en demi-teintes et de paysages banals. On s’ennuie au bord d’une mer grisâtre, sous un soleil trop pâle. On est triste, mais avec cette grâce maladroite de l’adolescence, sourire en surface, regard vide. Restons légers.

brian eno by this river 8) Brian Eno – “By this river” (Thomas Messias)
Extrait de Before and After Science – 1977 – Chanson triste

Je ne sais pas ce qui nous pousse, dans les moments les plus tristes, à aller chercher on ne sait quoi dans les morceaux les plus mélancoliques. Je ne sais pas pourquoi, reclus à l’hôpital aux côtés d’une rejetonne en souffrance, on se met à penser à ces films où des enfants meurent. Je ne sais pas pour quelle raison j’ai tant pensé à La Chambre du Fils de Nanni Moretti et au By this River de Brian Eno, le morceau qui le transperce tel un coup de flèche, alors que le Papayou de Carlos aurait sans doute fait plus de bien à mon moral.

pochette-les-chansons-de-l-innocence-retrouvee-etienne-daho-bandeau 9) Etienne Daho – “L’homme qui marche” (Catnatt)
Extrait de Les chansons de l’innocence retrouvée – 2013– Pop

J’ai essayé de choisir un autre titre, un autre artiste, mais ça ne pouvait être que celle-ci, ma chanson de novembre, elle s’impose car elle est importante. Rares sont les morceaux qui posent des mots sur une interrogation existentielle diffuse. Ceux qui ont moins de vingt ans ne peuvent pas comprendre, il faut qu’il se soit suffisamment passé de temps pour que le vertige vous saisisse. Etienne Daho aura croisé “mon destin” par deux fois. Jamais deux sans trois comme on dit… A l’aube de la vieillesse, j’imagine ; à mes futurs soixante ans.