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2014 vu par François-Régis/Pain-Noir

Par François-Régis Croisier, le 12-01-2015
Musique
Cet article fait partie de la série '2014 vu par...' composée de 7 articles. Dans l’optique de faire un point d’étape avant de passer à la suite, Playlist Society invite, tout au long de sa série ‘2014 vu par…’, des personnalités (écrivains, musiciens, réalisateurs…) à évoquer leur année 2014. Voir le sommaire de la série.

painnoir

Introduction de Benjamin : On aurait largement pu se contenter des chansons de François-Régis Croisier à l’époque où il chantait celles-ci en anglais sous le nom de St. Augustine. Pourtant dès les premières écoutes de Pain-Noir, on sait que sa nouvelle incarnation, portée par des textes en français, va nous emmener bien plus loin. Plutôt que de rester un bon songwriter, peinant cependant à s’extraire de la masse, François-Régis a décidé de tout remettre en jeu et d’aller là où peu de compositeurs vont, vers un folk à la française, à la fois mélancolique et plein de promesses, tout en s’inscrivant dans la tradition des grands groupes de rock français tels que Tue-Loup. Si Bertrand Belin est un musicien mystérieux dont chaque morceau est une énigme qu’on ne peut qu’efflorer, Pain-Noir en est l’alter-ego humain, celui dont on se sent proche et avec qui on a envie de partager plein de choses. Originellement écrit avant les événements du mercredi 7 janvier, ce « 2014 vu par Pain-Noir » a été complété par une liste de musiciens dont les chansons aident à se sentir mieux en ces moments difficiles.

J’adorerais prétendre que 2014 a été une année pleine de découvertes passionnantes, d’expositions pointues et de voyages exotiques. Dans la pratique il n’en est rien, et l’essentiel de l’année aura été consacrée au travail. Je n’ai pas souvenir d’une année qui ait été aussi chargée, et c’est très bien comme ça.

Je n’ai certainement pas lu la moitié des livres que j’aurais aimé lire, j’ai dû voir quatre films, me suis endormi plus souvent qu’à mon tour devant des séries et pas écouté plus d’une quinzaine de nouveaux disques, mais 2014 a été une année de rencontres et de collaborations assez incroyable. Pour la première fois dans ma vie musicale, les choses se sont déroulées sans heurts et grâce doit être rendue aux responsables.

J’ai enregistré le disque de Pain-Noir avec Olivier Perez de Garciaphone. Nous nous connaissons depuis très longtemps et nous n’avions pourtant jamais réellement travaillé ensemble. Il est un de mes songwriters préférés (je ne lui dirai jamais en face, hein) et je ne suis pas sûr que le disque eut existé sans lui. Il a enregistré, mixé, remixé, reremixé, joué les batteries et les éminences grises et apporté la rigueur et le regard qui me manquaient.

Les choses se sont si bien déroulées que ce qui devait à l’origine être un EP s’est vite transformé en album. Cela n’a aucunement troublé Jean-Charles de Microcultures. J’ai découvert grâce à lui cette année qu’il est possible de faire un disque pour un label avec qui tout est clair, centré sur la musique et sur le plaisir que l’on a à travailler ensemble. J’ai éprouvé pour la première fois depuis longtemps en rejoignant Microcultures un chouette sentiment d’appartenance.

Je me suis aussi rappelé en 2014 qu’il y a vraiment avec et autour de nous musiciens des gens passionnés, passionnants, indépendants, sincères, fidèles (ne rayez pas de mention inutile) sans qui nous ne serions pas grand-chose. Et oui, si vous en doutez, je parle bien de vous Vincent Théval et Label Pop, Chryde et La Blogothèque, Benjamin et Laurent de La Souterraine, Matthieu Dufour, Richard Robert, tous les Indiectators et tous ceux que j’oublie forcément.

***

Je reprends et termine l’écriture de ce retour sur 2014 aujourd’hui jeudi 8 janvier et ne peux évidemment pas faire comme si de rien n’était. Sans m’étendre plus avant sur les évènements tragiques d’hier, je peux seulement souhaiter qu’un peu de lumière sorte de cette horreur.

Mon année 2014 a été accompagnée par les disques de mes amis The Wendy Darlings, ceux de Françoise Hardy, King Creosote Doug Paisley, Weezer, Rodrigo Amarante et Howe Gelb, les livres de Steve Tesich, Emmanuel Carrère ou Bruce Machart et la poésie de Desnos. Ils continueront à me suivre en 2015 où je sais que les chansons de Dempster Highway, Garciaphone, Matthew E. White et bien d’autres viendront joindre cette liste des choses qui aident à vivre un peu mieux.

Aussi simple et bête que cela puisse sembler, je crois sincèrement que c’est par l’éducation, l’art et la culture que nous avancerons.

On ne tue pas l’espoir.

En 1942, quand tout devait sembler perdu, Robert Desnos a écrit ceci :

Âgé de cent mille ans, j’aurais encor la force
De t’attendre, ô demain pressenti par l’espoir.
Le temps, vieillard souffrant de multiples entorses,
Peut gémir : Le matin est neuf, neuf est le soir.

Mais depuis trop de mois nous vivons à la veille,
Nous veillons, nous gardons la lumière et le feu,
Nous parlons à voix basse et nous tendons l’oreille
À maint bruit vite éteint et perdu comme au jeu.

Or, du fond de la nuit, nous témoignons encore
De la splendeur du jour et de tous ses présents.
Si nous ne dormons pas c’est pour guetter l’aurore
Qui prouvera qu’enfin nous vivons au présent.

***

Je vous embrasse tous.

François-Régis/Pain-Noir