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01. Erik Truffaz (feat. Ed Harcourt) – Manon (Esther Buitekant)
Extrait de “Arkhangelsk” – 2007 – Jazz
Arkhangelsk, un territoire du nord de la Russie dont le nom exhale des parfums de vodka, de nuits sans fin, de neige grossièrement entassée sur un trottoir sale. J’ai découvert cet album du trompettiste de jazz Erik Truffaz à sa sortie en 2007. Un disque atypique, où se mêlent les notes envoûtantes de la trompette et les voix singulières des chanteurs invités à y déposer leurs mots. Je l’écoute souvent en ce mois de septembre, parce qu’il évoque l’automne et la solitude. La douzième chanson s’intitule Manon. Une ballade entêtante et douloureuse bercée par l’accent du chanteur anglais Ed Harcourt. J’ai toujours eu l’impression qu’il s’agissait d’un duo entre la trompette d’Erik Truffaz, sourde et triste, incarnant Manon et un amoureux éconduit. On peut essayer d’être heureux et écouter des chansons tristes, n’est-ce pas ?

The-Walkmen-Heaven02. The Walkmen – We can’t be beat (Alexandre Mathis)
Extrait de “Heaven” – 2012 – Rock
On ne va pas se mentir, ça n’a pas été le meilleur été de ma vie. Des vagues, un navire qui tangue et on pourrait continuer comme ça les métaphores maritimes. Mais à l’image du roseau dans Le Chêne et le roseau, l’important n’est pas de s’interdire de plier mais d’éviter de rompre. Du haut de sa voix de rêveur enragé, Hamilton Leithauser sonne la révolte intérieure. Dès l’ouverture de l’album Heaven, The Walkmen donne envie de se redresser, de regarder l’Autre droit dans les yeux et de dire : je tiendrai le choc. Et puisqu’il y a toujours une fureur dans leur musique, We can’t be beat file aussi le sourire. Chanson parfaite.

03. Lou Barlow – Moving (Benjamin Fogel)4eb6d2f0
Extrait de “Brace the Wave” – 2015 – Indie Folk 
Difficile pour moi de ne pas écouter le nouvel album de Lou Barlow en boucle tant il me rappelle des émotions d’antan tout en me touchant dans mon quotidien. D’un côté, il y a cette rugosité romantique, proche du grunge et de Pearl Jam, de l’autre il y a cette sensibilité et cette finesse d’écriture qui rappellent une fois de plus combien, à l’instar de J Mascis, son comparse de Dinosaur Jr, il est un grand songwriter. Une chanson comme Moving me met les larmes aux yeux, tout en me régénérant complètement.

LOW_OnesSixes_cover04. Low – Lies (Anthony)
Extrait de “Ones and Sixes” – 2015 – Slowcore
Le nouvel album de Low ne devrait pas être le secret bien gardé d’une poignée de fans contemplatifs. Le trio de Duluth poursuit son chemin discret après plus de 20 ans de carrière (être né au temps du grunge est un lourd fardeau et nécessite un peu de persévérance…) et livre avec Ones and Sixes un album superbe, d’une richesse mélodique qui nécessitera plus d’une écoute pour en apprécier la pureté sans fioritures. Lies est à ce titre un petit bijou… Why don’t you tell me what you really want, instead of making up the same old lies, lies, lies

Sexwitch-album-cover-560x56005. Sexwitch – Helelyos (Arbobo)
Extrait de “Sexwitch” – 2015 – Psyché persan
Revisiter les autres pour mieux se réinventer. Natasha Kahn avait séduit d’emblée et rendu énamouré votre serviteur avec son premier album, puis fini par convaincre, sur la longueur, que le deuxième valait la peine. Le troisième confirmait le sentiment de pente douce. Femme aimable, artiste attirée par l’ésotérisme, chanteuse captivante, on n’avait pas renoncé à aimer son travail. On attendait le rebond, le tournant. Son talent indéniable pour les reprises lui offre un nouvel élan. Elle en a souvent régalé avec BfL (Nico, Depeche Mode, the Cure, Springsteen…). Voici Sexwitch, nouveau projet de Kahn, du groupe Toy, et du producteur Dan Carrey. Merveille de rythmes hypnotiques, production impeccable, voix magnifique, tout est là. On peut lui savoir gré d’avoir puisé dans le répertoire psychédélique oriental, dont quelques compilations firent le bonheur de happy few underground (Pomegrenates, etc.). Le Helelyos de l’iranien Zia Atabi avait déjà de la gueule. Revu par Sexwitch, il devient la bande son nocturne parfaite. Inclassable ? Inlassable.

WithALittleHelpFromMyFwends06. Flaming Lips feat. Miley Cirus – A Day In The Life (Isabelle Chelley)
Extrait de “With A Little Help From My Fwends” – 2014 – Reprise des Beatles hallucinée
Voir les réactions outrées de certains en apprenant que les Flaming Lips sortaient un album avec Miley Cirus m’a donné envie de réécouter leur tribute aux Beatles de l’an dernier. Le disque en lui-même était assez indigeste et un peu moins sobre qu’une licorne psychédélique ayant braqué l’usine de paillettes. Mais au milieu des excès surnageaient deux pépites, le single (Lucy In The Sky With Diamonds) et A Day In The Life, tous les deux enregistrés avec Miley Cyrus – ça ne peut pas être une coïncidence. J’ai toujours été fascinée par le dernier morceau de “Sgt Pepper” et je me souviens, après l’avoir découvert, d’avoir lu tout ce que je pouvais à son sujet dans l’espoir de comprendre sa signification. Dans cette nouvelle version, le côté psyché-fracassé-décousu a été préservé et amplifié, sonnant comme un semi-bad trip au LSD. Et l’intervention de Miley Cyrus, mortellement blasée, sans émotion si ce n’est un fond de tristesse dans sa voix un peu éraillée, est juste parfaite, note de sobriété poussée à l’extrême dans ce gros gâteau sonore.

Richard_Thompson_Still_album_cover07. Richard Thompson – Guitar Heroes (Thierry Chatain)
Extrait de “Still” – 2015 – Classic rock
Guitar hero lui-même avant même sa majorité avec Fairport Convention, formation phare du folk-rock anglais à partir des années 60, Richard Thompson a su bien vieillir en se jouant des étiquettes – et en montrant qu’il est bien davantage qu’un branleur de manche. Motard nourri de spiritualité soufie à l’humour cruel, notre homme, produit par Jeff Tweedy, le leader de Wilco, l’un de ses nombreux fans, revient ici  sur son obsession adolescente dévorante pour la six-cordes. L’occasion de rendre un malicieux hommage “à la manière de” à Django Reinhardt, Les Paul, Chuck Berry et aux Shadows, tout en confiant qu’il n’est toujours pas sûr d’être à leur hauteur. Des doutes aussitôt démentis par 56 secondes d’un de ces solos torturés mais concis qui sont l’une de ses marques de fabrique, lorsqu’il préfère la Stratocaster à l’acoustique.

alain-souchon08. Alain Souchon – C’est déjà ça (Thomas Messias)
Extrait de “C’est déjà ça” – 1993 – Chanson française
On sous-estime trop souvent la dimension politique de l’oeuvre d’Alain Souchon. J’aime sa circonspection face aux religions (Et si en plus y a personne). Son air penaud devant le SDF qui dort sous son carton dans l’indifférence la plus totale (Petit tas tombé). Sa façon pudique de se mettre à la place d’un réfugié soudanais arrivé rue de Belleville (C’est déjà ça). Terrible chanson, poétique et cruelle, sur un homme parmi tant d’autres qui se félicite de pouvoir au moins respirer. En ces semaines où la détresse de notre planète semble avoir encore franchi un palier (à moins que ce soit simplement le traitement médiatique qui se soit amplifié), en ces temps où je ne me détache plus d’un fort sentiment de culpabilité vis-à-vis de tous ceux que je ne sais pas aider, les chansons de Souchon sont le placebo qui me soulage temporairement. C’est déjà ça.

Thundercat - The Beyond09. Thundercat – Them Changes (Christophe Gauthier)
Extrait de “The Beyond / Where The Giants Roam” – 2015 – Funk frustrant
Peut-être que j’arrive après la bataille. Peut-être que tout le monde connaît déjà Steve Bruner alias Thundercat, bassiste virtuose et précieux comparse de Flying Lotus et de Kendrick Lamar. Peut-être que j’aurais pu succomber dès sa sortie à The Beyond / Where The Giants Roam, EP paru en juin et dont les 16 minutes impeccables sont marquées par la mort, le désarroi et la solitude. Peut-être qu’il ne s’agit en fait que d’une mise en bouche, d’une première dose offerte par le dealer Thundercat pour mieux rendre accro à sa came de haute qualité. Je ne sais pas. Tout ce que je sais, c’est que je peux écouter l’EP en boucle, m’arrêter un moment sur Them Changes par lequel tout est arrivé, être frustré par sa fin au beau milieu d’un solo (sans même parler du dernier morceau du disque qui se termine en queue de poisson). Si c’est annonciateur d’un album à venir, ce sera un très grand disque.

AlinaOrlova 15010. Alina Orlova – Utrom (Marc Mineur)
Extrait de “88” – 2015 – Folk lituanien
On n’était pas là pour elle, on n’a rien vu venir. Pourtant, après quelques secondes de sa voix magique, on était conquis. Et on l’est resté. Sans doute que la fascination d’une découverte en live est supérieure à celle qu’on peut ressentir à l’écoute de ses albums, mais il n’en reste pas moins qu’un des talents vocaux de notre époque se niche en Lituanie. Certes, la production de son dernier album “88” (son année de naissance) laisse parfois la part trop belle à quelques sons surannés, mais il faut découvrir cette jeune artiste. Voilà, on est là pour ça aussi…

JoannaNewsomArt11. Joanna Newsom – Sapokanikan (Nathan)
Extrait de “Divers” – 2015 – Retour miraculeux
Depuis le prodigieux Have One On Me, Joanna Newsom était discrète. Une apparition chez Paul Thomas Anderson dans l’étrange Inherent Vice nous rappelait qu’on attendait toujours, les mains tremblantes, un nouvel album. Prières exaucées, Divers est là (ou presque). Et dès les premières mesures, on retrouve le miracle permanent de la voix de Joanna, son sens de la mélodie, ses paroles distillées avec magie. Comment a-t-on pu vivre si longtemps sans toi, Joanna ?