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Il aura donc fallu 20 ans – depuis la sortie de Nomad Soul – pour que David Cage réalise enfin son objectif : proposer un véritable film interactif où compte chaque décision du joueur. Detroit : Become Human, le dernier né du studio Quantic Dream, propose un scénario passionnant qui pose la question suivante « Les intelligences artificielles peuvent-elles potentiellement constituer une nouvelle espèce à part entière, avec laquelle les humains devront cohabiter ? » Cette question résonne au sein d’un jeu où le joueur incarne trois androïdes différents, et où les humains constituent plus souvent une menace qu’un soutien.

L’idée de « finir le jeu » n’a ici aucun sens. Non pas parce qu’il s’agit de dérouler une histoire aux scénarios et aux fins multiples, mais parce que le seul enjeu est de constituer sa propre histoire, en s’assurant qu’elle soit la plus intense possible. Dans un jeu normal, un objectif serait de s’assurer que les héros survivent et triomphent à la fin, mais ici le vrai plaisir consiste à les opposer les uns les autres, à complexifier leur personnalité pour en tirer la plus belle tragédie.

Tout au long du jeu, Connor a été mon Terminator

Dans les précédents jeux de Quantic Dream – Heavy Rain et Beyond: Two Souls en tête –, une fois le générique de fin déroulant à l’écran, le premier réflexe était soit d’imaginer refaire le jeu en faisant des choix différents, soit d’aller visionner sur YouTube les fins alternatives possibles, celles que l’on avait loupées. À titre personnel, cette idée ne m’a absolument pas traversé l’esprit à la fin de Detroit : Become Human. J’ai créé ma propre histoire et la dernière chose dont j’ai envie est de découvrir qu’elle aurait pu se dérouler différemment. J’aime l’idée qu’il y ait une forme d’unicité dans ce scénario que j’ai créé, et que les parties d’autres joueurs aient généré des personnages et des situations qui n’ont rien à voir. Par exemple, tout au long du jeu, Connor, l’humanoïde négociateur au sein des forces spéciales de la police, a été mon Terminator (version Terminator 1), une machine sans âme qui exécute froidement sa mission. Je ne doute pas que certains aient choisi d’en faire un IA qui s’humanise au fur et à mesure du jeu au point de venir en aide aux deviants, ces humanoïdes menés par Markus qui se battent pour leur liberté. Mais je ne veux rien savoir là-dessus. Si l’on me parle de Detroit : Become Human, je veux pour voir dire que c’est une œuvre qui aborde via trois protagonistes chacune des trois options que les robots pourraient choisir face à la société humaine : la servilité avec Connor, la fuite avec Kara, la rébellion avec Markus. Est-ce là les intentions de l’œuvre écrite par David Cage ? Probablement pas. Mais il a créé avec succès le cadre permettant à cette histoire d’exister, ce qui en soi me parait une avancée majeure dans le travail Quantic Dreams.